Le jour où… je me suis fait arrêter par l’armée chinoise

Lorsqu’en 2007 j’entrepris mon premier voyage au Tibet, j’eus la chance de faire la connaissance d’un guide tibétain avec qui je me liai rapidement d’amitié. Bien que le Tibet soit encore très peu exploré par les touristes occidentaux, l’itineraire que je suivis fut somme toute assez classique: quelques jours à Lhasa, capitale de la région, puis une semaine en 4×4 via le camp de base de l’Everest, pour finir à Katmandou au Népal.

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Je promis à notre guide Tenzin (pas son vrai nom, juste au cas où…) de revenir le voir, ce que je fis en 2009. Cette fois-ci, notre itinéraire serait beaucoup plus hors des sentiers battus, car nous allions explorer le Kham et l’Amdo. Ces deux provinces, administrativement en dehors de la Région Autonome du Tibet, sont pourtant de culture très majoritairement tibétaine. C’est là qu’habite sa famille, avec laquelle nous passons plusieurs jours.

Très reculée, à deux jours de route de l’aéroport international le plus proche (Chengdu), cette partie du pays ne voit jamais de touristes, encore moins occidentaux. Regards curieux et insistants garantis, et méfiance des autorités chinoises, qui pensent vraisemblablement que nous sommes des journalistes.

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Une visite de monastère, dont le nom m’échappe (et que je n’arrive pas à retrouver, honte éternelle sur moi), me fit prendre conscience de l’isolement de cette région du monde.

Ce matin là, Tenzin nous annonce qu’il nous emmène rendre visite à sa soeur, nonne dans un monastère à quelques heures de route. Problème, la politique locale change fréquemment, et selon les jours, le monastère peut être interdit d’accès aux étrangers. Comme nous ne voulons pas prendre le risque d’être stoppés à l’arrivée, Tenzin nous fait  coucher entre les sièges. Nous allons tenter de passer en fraude. Rassurez-vous, nous ne risquons tout de même pas grand chose si nous sommes arrêtés.

Nous passons donc la barrière d’entrée comme des clandestins. Contents de nous, nous visitons librement pendant plusieurs heures cet incroyable sanctuaire ou des dizaines de moines pratiquent leur foi. Étonnant contraste, face aux monastères dépeuplés des environs de Lhasa, dans lesquels une poignée de moines semblent plus interessés par collecter les droits d’entrée que par une quelconque élévation sprituelle.

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Alors que nous pensons que finalement, aucune interdiction ne devait être en vigueur ce jour-là, un homme à la mine patibulaire et au sourire forcé nous entreprend (j’ai l’air d’écrire cela pour accentuer l’effet dramatique, mais je vous jure qu’il n’avait pas l’air commode). L’accès est bel et bien interdit aux étrangers, et ils nous invite fermement à le suivre jusqu’au poste militaire.

Les officiers de garde sont courtois, mais fermes. Nous n’avons rien à faire ici. Ils nous posent des questions (que Tenzin nous traduit, bien évidemment) pendant ce qui nous semble une éternité (mais ne doit en fait pas dépasser les 30 minutes), relèvent nos identités, nous demandent si nous avons pris des photos (non, non, bien sûr! – pourvu qu’il ne vérifient pas notre carte mémoire)… et nous somment de vaquer séance tenante.

Nous vaquons donc… et Tenzin appelle sa soeur pour lui dire que malheureusement, nous ne pourrons donc pas déjeuner chez elle comme prévu. Mais la nonne qui a passé la matinée à cuisiner pour nous ne l’entend pas de cette oreille! Tenzin nous abandonne donc à quleques dizaines de mètres de l’entrée du monastère, derrière une butte, et part chercher la jeune femme.

Ce jour là, nous déjeunerons de momos (raviolis tibétaines) « à emporter » dégustés sur l’herbe, planqués derrière un tertre à quelques pas du poste militaire. Un délice!

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