Depuis quelques mois, la Birmanie occupe le devant de la scène internationale. Hilary Clinton y a effectué en décembre le premier voyage d’un chef de la diplomatie américaine depuis 1995, Alain Juppé a suivi ses traces début janvier… Les sanctions économiques de l’Europe envers une des dictatures les plus dures au monde viennent d’être allégées… On parle d’ouverture, d’assouplissement du régime…

Est-ce ce contexte international qui m’a attiré ? Pas du tout ! Une simple coïncidence. Mon premier voyage au pays des 1000 pagodes date de 2005, le pays était déjà magnifique alors, il l’est toujours. On ne peut que se réjouir que la junte militaire au pouvoir décide de réformer le pays, bien qu’il soit difficile pour le moment de savoir s’il s’agit d’une soudaine conscience démocratique, d’une simple façade pour redorer son image ou d’une manœuvre politique destinée à endiguer la contagion du printemps arabe.
Pour le voyageur, le changement n’est pour l’instant pas perceptible. Le pays s’est ouvert au tourisme il y a déjà plus de 15 ans. En 2005, voyager en Birmanie était d’une facilité déconcertante. En 2012, c’est toujours le cas.
Seuls changements notables pour moi : l’apparition des téléphones cellulaires, et de Coca-Cola. Quelques touristes en plus aussi…
Sur place, les militants des droits de l’homme et les acteurs de l’industrie du tourisme sont aux aguets, optimistes pour l’avenir de leur pays. Le Birman de la rue, lui, attend avec scepticisme. Pour lui, l’ouverture n’est pour l’instant qu’une vague idée. Son essence est toujours rationnée, la police est toujours sur ses talons, il a du mal à joindre les deux bouts, la situation économique est toujours catastrophique… Bref, il attend de voir. Il risque tout de même d’avoir à attendre un certain temps, car on ne rattrape pas 30 ans de dictature et de marasme économique en quelques semaines.
Et malgré tout, les Birmans ont toujours le sourire. Fatalisme ? Optimisme béat ? En tout cas, il faut bien dire que l’un des attraits principaux de ce pays pour le voyageur est l’accueil incroyable de ses habitants. Faites le test : dans une ville, un village, ouvrez une carte, ou simplement arrêtez-vous pour regarder autour de vous d’un air interrogateur. Il ne se passera pas 3 minutes avant que quelqu’un vienne à votre rencontre pour vous demander s’il peut vous aider.

Dans les coins un peu plus reculés, le simple fait de vous balader vous attirera moult « Bye bye » (oui, Bye Bye, pour un Birman, c’est Bonjour en langage blanc !), sourires, signes de la main… Vous êtes une curiosité. Vous êtes une star. Vous êtes étranger. Profitez de cette popularité en souriant et en saluant à tour de poignet tel une Miss France en goguette.

Programme chargé. Je suis en Birmanie pour mettre à jour un guide, pour trouver des partenaires pour organiser vos voyages, et pour vous trouver des coins hors des sentiers battus. Je suis aussi en Birmanie parce que j’adore, et parce que, je vous le donne en mille, j’aime voyager.
Le visa touristique ne peut excéder 28 jours. Je resterai donc 28 jours. Pas un de moins. Les 15 premiers jours, nous sommes deux, une sorte de révision de notre voyage de noces de 2005. L’occasion de sortir des grands classiques.
Et deux coups de cœur : Mrauk-U (à prononcer Miaou, facile à mémoriser), un site un peu oublié des touristes, car un peu difficile à rejoindre (avion + 7 heures de bateau, ou bus + bateau pendant 2 jours). Et pourtant, la récompense est là : des collines couvertes de cocotiers, parsemées de pagodes et de temples pluri-centenaires, au milieu desquels les moines déambulent et les bergers mènent leurs chèvres. Sans parler des enfants qui agitent leurs cerfs-volants et font des pieds et des mains pour se faire prendre en photo.


Deuxième coup de cœur, Hpa-An, capitale de l’état Karen. Petit cours d’ethnologie au passage, la Birmanie est une mosaïque multiculturelle d’une diversité impressionnante : 7 « races nationales » répertoriées par le gouvernement, et plus de 130 minorités ethniques. Chacune sa langue, et chacune sa culture. Hpa-An, donc, vaut le détour pour ses grottes remplies de bouddhas, ses montagnes karstiques, ses monastères perchés sur des collines… et pour son coucher de soleil sur la rivière, tout simplement !

Ah si, quand même impressionnant aussi, le Rocher d’Or. Un haut lieu de pèlerinage pour les bouddhistes de Birmanie et des pays voisins. Ultra-touristique, donc. Mais un tourisme local, et donc passionnant à observer. Là aussi, vous êtes une star, et on vous photographie plus que vous ne photographiez !

Deuxième partie du voyage, seul, en mode travail intensif. Je revisite les grands classiques, et les grands classiques étant beaucoup plus fournis en hôtels, restaurants, magasins d’artisanat local, etc., je passe de longues journées à arpenter les villes en long, en large et en travers en fourrant mon nez partout. Ce qui ne m’empêche pas de prendre le temps d’apprécier le bateau sur le lac Inlé, ou de faire l’effort (ceux qui me connaissent savent que c’est vraiment un effort) de me lever à 4h du matin et d’enfourcher mon vélo pour m’émerveiller devant un lever de soleil sur les milliers de temples de la plaine de Bagan.
Je vous laisse découvrir tout cela en photos, bien plus parlantes que ma modeste prose. En plus des photos de cet article, je posterai bientôt un album photo complet. Attention les yeux !



Avant de conclure, ouvrons un sujet qui me tient particulièrement à cœur : voyager en Birmanie, est-ce aider les habitants, ou soutenir la dictature militaire ? Et bien heureusement ou malheureusement, forcément un peu des deux. Je ne partage pas l’avis de certains qui appellent à un boycott total, tout simplement parce qu’isoler un pays et lui couper des sources de revenu n’est à mon sens pas d’une grande efficacité. Je ne suis pas expert en géopolitique, mais je n’ai pas en tête d’exemple de régime dictatorial qui ait mué en démocratie parce qu’on lui avait tourné le dos et fermé les robinets.
En revanche, cela ne veut pas dire qu’il faut visiter la Birmanie n’importe comment. Vous ne pourrez pas a priori éviter de donner une part de votre argent à l’armée, tout simplement via les taxes que vous payez sur tous vos achats. La bonne solution est de faire profiter au maximum le secteur privé. Comment ? En privilégiant les structures simples plutôt que les grands hôtels, souvent possédés par le gouvernement (tout ou partie), en évitant au maximum de prendre l’avion ou le train, en n’hésitant pas à faire de petits achats dans de petits magasins… Votre argent peut aider la population s’il est employé intelligemment.
Côté organisation de votre voyage, certains détails ont une importance capitale, dans un pays encore fermé comme la Birmanie. L’argent en est une parfaite illustration. Pas de retraits d’argent possible, il faut amener vos propres dollars, neufs obligatoirement sinon on refusera de vous les échanger… Mais il existe pléthore d’autres trucs à savoir, dont nous parlerons bien sûr quand nous organiserons ensemble votre voyage !
Et ne tardez pas trop, car que l’ouverture soit réelle ou pas, le tourisme de masse frappe à la porte du pays… Les autorités sauront-elles le gérer intelligemment ? Réponse dans quelques années…
[…] Birmanie, 7 ans plus tard […]
Je reviens moi aussi de Birmanie, pour une première visite. Et je suis complétement d’accord avec votre message. Population absolument adorable, très touchante. Nous avons eu la chance de privilégier les rapports avec les birmans aux temples par notre voyage dans un van de 6 personnes dont 1 chauffeur et 1 guide birmans. Extraordinaire. Nous avons eu la chance d’être accueilli dans un village reculé (ou nous avons apporté des cahiers et crayons ) comme des rois. La police nous a malheureusement interdit d’y dormir, mais cette expérience est inoubliable.
Nous avons assisté à Mandalay à une expo sur Aung San suu kyi et les gens pleuraient en nous voyant nous associer à leur démocratisation. J’espère comme vous que cette ouverture est réelle et que l’afflux de touristes ne va pas trop « pourrir » ces gens extraordinaires, simples et très attachants
bon… je me permets quelques commentaires… parce que je suis comme ça, difficile à faire taire ;-)!
outre les téléphones cellulaires (moine avec un iPad…. CHECK !!!) et le coca, j’ai pour ma part noté de subtiles mais évocatrices évolutions… des couples qui se tiennent la main dans la rue, une attention beaucoup plus nette à la mode vestimentaire (mais en conservant le traditionnel longyi), des jeunes qui avouent avec un brin d’excitation dans la voix qu’il ont une petite amie (hihihihi), des séries télé brimanes sans moines comme personnages principaux (si, si, si, … inenvisageable il y a 5 ans)… le Myanmar, surtout à Yangon, avance, c’est sûr… mais pour le moment sans perdre son identité.
Merci. Je viens de faire une pause géniale… Juste une question :comment prononce-t-on « Hpa-An » ? hé hé
« Pas Anne ». Héhé. 🙂